samedi 24 juillet 2010

Sábado 24 de julio de 2010, ou l'introspection entre deux voyages



Assis dans ma chambre, que ma famille d’accueil, gentiment, me fournit depuis quelques jours, bien que le stage soit fini depuis bientôt un mois, je pense et reviens sur mon expérience de ces derniers jours à Lima, mais aussi, plus généralement, à mon expérience d’expatriation, ici et en Europe. Tout cela en attendant de quitter pour Huaraz…

Premièrement, un souvenir très vivide, malgré l’alcool du moment dans mon sang; je me souviens dire à José, la petite amie québécoise de mon frère péruvien, que je commence à m’ennuyer un peu du Québec, particulièrement certaines choses, l’exemple m’ayant venu en tête à ce moment est les midis au pub universitaire de l’Ulaval, autour d’un bon hamburger, en compagnie d’un ou deux amis proches. Un petit environnement social où l’on peut se perdre facilement. Réconfort, confort, chaleur, amicalité…mais n’est-ce pas le même ici? N’idéalise-je pas le Québec en ce moment? Après tout, je me souviens très bien de l’ennui me déchirant les entrailles pendant plus d’un mois, à mon retour d’Europe. Dans mon discours, tout était mieux en Europe : la nourriture, les gens, la culture, les activités, etc. Les symptômes du choc de retour se comptaient sur plus d’une main : isolement, frustration, tristesse, nostalgie, etc. N’ayant pas vraiment eu de suivi à mon retour, que ce soit auprès d’un spécialiste ou bien de la part du Bureau International, je m’étais remis du choc de retour, peu à peu, grâce à l’aide du temps, oui, mais aussi grâce à une routine plus importante, avoir des plans, quoi. Plus de responsabilités, plus de travaux, plus d’activités, de quoi se remettre rapidement du : « le Québec, c’est donc ben plate ».

Deuxièmement, je pense à l’accueil dont fait preuve ma famille péruvienne. Je ne sais pas si c’est un sens de l’obligation envers moi, ou encore une pure générosité (je penche pour la 2ème option), mais ils me fournissent encore un toit, et même les repas. Il y a deux jours, nous sommes allés manger à un buffet, et ils ont payé la facture, donc payé pour moi et mon vrai frère qui était en visite au Pérou pour 10 jours. Je ne peux pas juger pour l’ensemble des familles du stage, mais j’aimerai donner mes impressions : en premier lieu, d’après les commentaires entendues, les familles de cette année étaient toutes très biens. Les problèmes étaient plutôt indirectement reliés à celles-ci, comme,
par exemple, des problèmes de vols de vêtement par une ménagère, ou encore le « manque » de jugement de la famille d’accueil en pensant avoir la capacité d’accueillir plus d’un stagiaire. De plus, je crois sincèrement que le gros de notre intégration à ce pays nouveau est non pas dû au toutefois remarquable travail de nos accompagnatrices, ou encore aux amis péruviens que l'on a pu se faire, mais bien aux familles. Celles-ci n'ont pas seulement partagé leur logement pour 2 mois. Ils nous ont aussi initiés à leur culture, aux conventions sociales qui l'accompagnent[1], etc. Autrement dit, ils nous ont permis d'éviter bien des faux pas et de commencer nos interactions avec la société péruvienne sur une base solide.




[1] «The tacit social conventions which presently are second nature to you just about certainly will be largely inoperative wherever you are going. » : Swarthmore College, « Culture Shock », Off-Campus Study, [En ligne], http://www.swarthmore.edu/Admin/ofs/departure/nonacademic/cultureshock.html (Page consultée le 11 août 2010)

vendredi 16 juillet 2010

Viernes 16 de julio de 2010, ou comment je me suis purgé de deux mois de débaucheries (et sûrement d'un steak d'alpaca passé date)

Loin d’en finir avec ma peine, un nouveau problème pointe le bout de son nez. Dans le bus, à mon retour du canyon de Colca, je me mets à me sentir mal et à vouloir vomir. Par un effort considéré surhumain sur le moment, je réussis à me retenir jusqu’à mon arrivée à mon auberge, pour tout de suite rentré m’enfermer dans les toilettes et me vider l’estomac. En soirée, je prends, malgré moi, un bus de 9h de temps Arequipa-Cuzco, puisque j’avais déjà acheté le billet. Je ne dors pas, je vomis et vomis. Je tente de prendre des médicaments pour contrer les vomissements, mais ceux-ci se retrouvent très rapidement dans les toilettes. Je me déshydrate très rapidement, ne pouvant conserver rien plus d’une heure, et ayant parfois des spasmes, même lorsque mon estomac est vide. Arrivé à Cuzco, je me fais assaillir par des taxistas, ils me demandent pour un hôtel. Je demande que l’on m’emmène à une clinique privée le plus vite possible…je demande le nom de la clinique….on me répond « Loki »…un nom familier, c’est un hôtel, pas une clinique. Je rage intérieurement devant le peu de considération de ces personnages. Je me dirige finalement sur une petite clinique, un peu miteuse. J’attends patiemment mon tour pour voir le médecin. Il me diagnostique une grave infection de l’estomac. On me met sur soluté. Peu de temps après, on me transfert à une autre clinique, la Clinica San José, clinique qui vise principalement les étrangers, et qui, selon toute indication, est très récente, plusieurs parties de l’édifice n’étant même pas encore finies. Le service est toutefois de qualité, et les frais élevés de mon hospitalisation de 3 jours m’amènent à utiliser pour la première fois mon assurance voyage qui, heureusement, payera les frais au complet. Cette fois-ci, on m’aura diagnostiqué Et une infection de l’estomac ET une infection des intestins.

Malgré l’attention des infirmières, et l’allure générale des lieux, on remarque une différence entre le grand luxe canadien ou américain et le grand luxe péruvien. Je dois raser ma barbe de deux semaines à l’aveuglette, n’ayant aucun miroir dans ma chambre, et n’ayant vu l’ombre d’aucun après en avoir fait la demande quelques heures auparavant. Chose dont je ne m’étonne plus, surtout depuis mes vacances en Espagne; personne ou pratiquement personne ne parle anglais. Je n’ose même pas imaginer les inconvénients, voir les dangers de tenter de recevoir des soins dans un pays étranger si on n’en maîtrise pas la langue et qu’on n’y parle pas anglais[1].


Entre deux mondes. Privilégié de ne pas avoir eu à utiliser le système public dont j’ai entendu tant de mal de la part de plusieurs péruviens, mais réalisant quand même que les soins ne sont pas tout à fait à la même hauteur que ce que j’aurais eu au Québec. Mais il faut bien comprendre qu’il faut avoir des attentes réalistes envers son pays hôte, pour bien s’adapter, et cela comprend les services médicaux.



[1] « D'aucuns soutiennent que plus les individus deviennent « acculturés » à la culture nord-américaine, par exemple, plus il est probable qu'ils aient des croyances, des pratiques et des habitudes d'utilisation relatives à la santé qui sont semblables à celles de la population dans son ensemble. Dans beaucoup d'études, on a supposé que la langue était une mesure de l'acculturation et non la première variable d'intérêt. Or, comme on le verra dans les sections qui suivent, les études récentes semblent indiquer que la maîtrise de la langue pourrait être le facteur déterminant » : « Barrières linguistiques dans l’accès aux soins de santé », Santé Canada, [En ligne], http://www.hc-sc.gc.ca/hcs-sss/pubs/acces/2001-lang-acces/effe-fra.php (Page consultée le 9 août 2010)

dimanche 11 juillet 2010

Domingo 11 de julio de 2010 , ou comment je me mets à détester mes propres racines

Me retrouvant à Arequipa, je suis frappé par un fait. Après avoir passé plus d'une semaine dans la jungle à parler plus espagnol que toute autre langue, je me retrouve dans un environnement où on entend plus de français que de castellano.

Et dire que, face à mon expérience en France, avec le recul, je considère ne pas avoir profité assez de la culture qui s'ouvrait devant moi. J'aurais préféré apprendre à connaître beaucoup plus de français, plutôt que presque exclusivement d'autres étudiants internationaux ou québécois. C'est pourquoi je me suis fais force de m'éloigner du groupe du stage pour plutôt me tenir avec des péruviens, fort de ma première expérience de voyage.

Et voilà que je me retrouve, malgré moi, entouré de milliers de touristes français...

Une journée de frustration, peut-être deux. Je maudis les français et le fait que leurs vacances soient tombées pile durant les miennes. Les français et leur air snob, toujours pressé, sachant mieux que quiconque, faisant miroiter leurs billets d'euros...les péruviens sont tellement mieux: plus ancrés dans la réalité, des gens terre-à-terre, sachant profiter de la vie...[1]

Et puis, tout à coup, durant une soirée, autour d'un verre, en compagnie de Joshua, mon nouvel ami péruvien de la selva, et sa petite amie, Lisa, suisse allemande, on me présente Robinson, un français. Tout à coup la révélation me frappe: qu'ai-je pu être con, dit-donc! Et pourquoi les français seraient si différents? Robinson, lui, est l'anté christ de toutes les idées préconçues que j'avais. Il est baba cool, a appris l'espagnol par lui-même, sans cours, durant ses 8 mois en Amérique latine. Il est resté plus de 4 mois en Bolivie, et, durant mon séjour à Arequipa, à quelques reprises, le verrais-je aux bras d'une péruvienne. Un type comme je l'ai aime, quoi. Comme quoi les préjugés ne prennent racine que dans l'ignorance et la fermeture face à l'autre.

Et puis, de toute façon, il ne faut pas s'enfermer dans un esprit d’intolérance face à ceux qui n’ont pas le même type de parcours de vie, d’expériences que nous[2]. En toute réalité, j'aurais pu rencontrer des français ou québécois dont c'était le premier voyage, et j'aurais quand même eu un super beau temps en leur compagnie. Il faut éviter de juger les gens aux premiers abords. Après tout, je me définis pas seulement comme un voyageur, mais comme un individu à part entière ayant des intérêts autres diversifiés et nombreux.)

Le lendemain, je croise, dans la rue, Robinson avec un ami français, Antoine, lui aussi baba cool, et m'invitant aussitôt à deux fêtes psychédéliques en Bolivie. Fort de deux nouvelles adresses courriel, et d'une invitation à être hébergé gratuitement à La Paz, je quitterai, outre mes problèmes qui feront l'objet d'un autre message, heureux Arequipa, ayant renoué avec cette francophonie que j'avais laissé de côté, stupidement[3].



[1] Le choc culturel se manifestant parfois de façon inverse, par un rejet systématique de la culture dont on est issue, et par une appropriation complète et non réfléchie de la culture d’accueil : Programme de jumelage des étudiants étrangers, conférence intitulée « Séances d'information et de sensibilisation aux relations interculturelles », Bureau de la vie étudiante, Ulaval, 2008.

[2]« Les gens d'ici qui ne sont pas sortis sont "plates", les étrangers et ceux qui ont voyagé sont intéressants et ouverts. » : Marcel BERNIER, « Séjour à l’étranger, le choc du retour », Centre d’aide aux étudiants, [En ligne], http://www.aide.ulaval.ca/sgc/pid/1481 (Page consultée le 28 juin 2010)

[3] « L’expatrié devra comprendre sa propre culture avant de comprendre la culture étrangère qui l’entoure » : SLEMBEK E., « Grundfragen der interkulturellen Kommunikation », dans Ingrid Jonach, Interkulturelle Kommunikation, Munchen, Ernst Reinhardt Verlag, 1998, p.28 cité par Égide Karuranga, recueil du Cours de gestion interculturelle, Ulaval, 2010.

lundi 31 mai 2010

Première rencontre avec mon frère péruvien, ou comment j'ai appris quelques vilains mots en espagnol et compris le concept de "brichera"



À première vue, rien de très spécial avec cette première photo. Seulement trois amis et la petite amie de l'un d'eux en train de prendre une bière dans un bar.

Toutefois, si on jumelle cette première avec la deuxième, on peut se mettre à douter de son impression initiale. En effet, sur cette deuxième photo, j'ai l'honneur de vous présenter 4 bricheras, qu'on pourrait méprendre pour de simple "party girls", si ne serait-ce de la première photo.

Vous devez maintenant vous demandez: mais qu'est-ce qu'une brichera? Et bien, pour reprendre les mots et l'analyse d'un autre internaute (laquelle analyse je supporte en tout point: http://http//www.expat-chronicles.com/2009/04/the-final-word-on-bricheras/) il y a deux types de bricheras, mais les deux se rejoignent sur plusieurs points, entre autres que l'on les retrouve autour ou sur la Calle de las pizzas, dans Miraflores.

Un brichera, pour simplifier la chose, est une femme péruvienne attiré par les étrangers, et ce, généralement pour une forme de gain ou une autre, que ce gain soit pécuniaire (1er type de brichera) ou de statut social (2ème type). Je n'irais pas plus en détails, risquant de répéter l'analyse de mon collège blogger.

En elle-même, la discussion sur les bricheras est intéressante, mais elle emmène à un autre sujet, un des maux dont souffrent le Pérou, et qui est encore plus chaud: le racisme.

Le Pérou souffre d'un grave problème de racisme. Il ne s'agit pas d'une analyse à deux balles, mais bien d'une réflexion longue de 2 mois et demie, et celle-ci ayant été alimentée par des faits lus, par des expériences concrètes, mais aussi par des débats avec des péruviens.

Le fait est qu'il est plus facile, au Pérou, d'être blanc sans le sou que métis/latin avec argent. On m'a compté les difficultés de quelques-uns d'entrer dans certains clubs et bars, notamment, Mama batata et Gotica. Ces lieux ont déjà fait l'objet de poursuite judiciaire pour allégation de racisme[1], et des personnes que je connais et leurs amis ont eu des difficultés parfois à y rentrer, malgré le fait de respecter le code vestimentaire et que d'autres, eux, pouvaient facilement y aller. Des québécoises m'ont aussi dit qu'une femme blanche pouvait sauter la ligne d'attente devant un club, relativement aisément.

Fait vécu par moi : Un jour, à la sortie d'un magasin, passant les détecteurs en même temps qu'un adolescent péruvien, ces derniers se mettent à sonner. Je puis marcher en-dehors sans problème, mais le jeune péruvien se fit aussitôt interpellé. Coïncidence? Je ne crois pas. C'est une chose d'être un peuple ouvert à l'autre, d'être attentionné, on a pu constater cela à plusieurs reprises, nos familles nous avertissant de bien faire attention, de ne pas rentrer trop tard, etc. Toutefois, cela en est une autre que de déprécier sa propre culture et d'idéaliser une autre. Et pourtant, ce sont les mêmes qui, si sondés, répondent que l'empire inca fût le sommet de la civilisation péruvienne, soit avant l'arrivée des caucasiens, des occidentaux...[2]

J'ai rencontré les deux types de bricheras. Du deuxième, j'ai eu l'expérience d'une péruvienne ayant vécu aux États-Unis, ne sortant qu'avec des Blancs, et n'ayant que peu de commentaires flatteurs à l'égard du Pérou, mais parlant avec nostalgie de son temps aux Nord de l'Amérique. Pour comprendre celles-ci, je vais citer le lien précédent:

I think the Type 2′s identify with or aspire to be a part of white culture as more of a rejection of the indigenous culture. While their skin might
be a mix of the two civilizations, they want to believe that their mind, their insides are more of one than the other.

Le type I est plus opportuniste. Il s'agit seulement d'une perception (révélée?) que les Blancs touristes auraient beaucoup plus d'argent qu'un péruvien typique. Il serait donc de l'ordre des choses de flirter avec ceux-ci, question de profiter de cocktails gratuits, d'un repas gratuit, et, peut-être, même d'un lit, d'une douche chaude et d'un numéro de téléphone, ou du contenu d'un portefeuille.

Cela ne s'arrête toutefois pas aux gringos, aux étrangers blancs. Non, cela s'applique aussi aux Blancs péruviens, souvent vus comme l'élite, là où le pouvoir et l'argent sont concentrés, au Pérou. Combien de fois ai-je vu une péruvienne très mignonne avec un Blanc péruvien qui, comme dirait-on, "got a girl WAYYYY out of his league". Permettez-moi de douter que la cause de cette relation pour le moins étonnante en est son sens de l'humour.

En conclusion, et sur une touche de pseudo-philosophie: si le Pérou veut progresser, il ne doit pas uniquement s'appuyer sur une croissance économique forte, mais aussi sur un changement de valeurs, une évolution des mentalités. Ce qui me vient le plus en tête, en ce moment, comme vous vous en doutez, c'est le racisme. Il faut toutefois éviter le piège d’un nationalisme xénophobe en contrepartie.



[1] « In 1998, in my annual summer visit to Peru, I was surprised by the outpouring of

denunciations against racism set off when the employees of four separate night clubs and a coffee

house in Lima barred entry to several persons seemingly because they perceived them to be non-white. » : Marisol DE LA CADENA, The racial politics of culture and silent racism in Peru, United Nations Research Institute for Social Development, [En ligne], http://www.unrisd.org/unrisd/website/document.nsf/ab82a6805797760f80256b4f005da1ab/ee7eb1e30a96c11f80256b6d00578643/$file/dcadena.pdf, p.12-13, (Page consultée le 25 juin 2010)

[2] Félix LOSSIO, conférence intitulée « (Des)articulaciones del Peru contemporaneo », PUCP, Lima, Pérou, 2010.